Qu’est ce qui fait la spécificité de notre écriture pour un projet de parcours sensible dans un musée ?
Nous concevons un ensemble dans lequel les mots ne sont qu’un ingrédient parmi d’autres données. Il s’agit en effet de construire une structure sensible qui permette au visiteur d’être présent à ses sensations pour se relier à son environnement, que celui-ci concerne une œuvre, un espace, une architecture.
Le terme de « présence » est ce qui conviendrait le mieux pour évoquer l’état physique et mental que nous souhaitons offrir au visiteur : le rendre présent à ce qui advient ou à ce qui existe autour de lui au moment où nous nous adressons à lui.
Nous allons donc concevoir une structure globale et décliner à l’intérieur des points d’ancrage. Tout ceci va créer un rythme pour l’ensemble du parcours : il y aura des moments de déplacements qui amèneront à des moments de suspension ou de respiration. Tout ceci est un peu comme une chorégraphie : des temps différents pour créer du mouvement dans la respiration et habiter l’espace en créant des points fluides et d’autres plus denses.
Les informations éventuelles concernant l’environnement ou l’œuvre sont ainsi incluses dans un maillage sensible qui prend en compte la respiration du visiteur.
Etant admis que chacun respire différemment, une souplesse dans l’énonciation des propositions doit permettre à chacun de trouver son rythme.
C’est d’ailleurs toujours intéressant d’observer comment chacun s’approprie les consignes. Les vitesses, les regards, l’ancrage du poids du corps dans le sol diffèrent.
Le rôle ou la fonction de notre écriture est de donner des indications qui valent pour tout un chacun mais qui puisse être interprétées tout autant. Entre la précision et ce qui pourrait sembler vague, nous naviguons en regard d’une cohérence d’ensemble.
Nous circulons entre la construction globale et la présence individuelle, créant un entrelacs de rencontres, de circulations, de rythmes, d’appropriation par les sens de ce parcours que nous proposons.
La mise en valeur des lieux ou des œuvres nait donc de la manière dont le visiteur est mis en état de « présence » à lui-même.
Micheline Lelièvre/ février 2016